Yusuke Saraya - Osaka (Japon) - 22 Janvier 2004

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Pour en savoir + :

Le site de Saraya

Le site de ZERI

 

 

 


Entrepreneur vert au Japon


L’industrie des détergents et des cosmétiques n’est pas traditionnellement reconnue pour son engagement envers la préservation de l’environnement et la recherche de solutions aux grands enjeux écologiques. Pourtant, au Japon, une société de ce secteur d’activité est depuis de nombreuses années encensée et prise comme modèle d’entreprise « verte ». Un cas d’école pour jeunes patrons ambitieux et visionnaires.

Yusuke Saraya grandit dans un petit village près d’Osaka, dans le sud de l’archipel nippon. Fils du fondateur de Saraya Limited, spécialisée dans la fabrication et la commercialisation de savons pour le grand public et de produits de nettoyage pour l’industrie alimentaire, il est conscient, depuis tout jeune, de l’impact écologique de ces activités. Il se qualifie avant tout comme « un amoureux de la nature et un randonneur passionné ». À 35 ans, déjà marié et père d’une petite fille, il hérite du groupe familial.

Rapidement, il prend conscience que même si, déjà, la majorité des produits de Saraya sont à base d’huile de coco et d’huile de palme, à 99,9 % biodégradables, cela ne suffit pas. Il faut ne conserver que les produits dont l’impact sur l’environnement est le plus faible, surtout que leur efficacité est identique voire supérieure à d’autres, à base de produits chimiques. Il lance des gammes de savons « bio » pour ménagères et s’empare rapidement de plus d’un quart de ce marché.

Saraya fait désormais un chiffre d’affaires de 150 Millions d’Euros et emploie plus de 1500 personnes. Cette taille lui impose, s’il veut être cohérent d’aller plus loin dans sa démarche. Au-delà des gammes, il faut minimiser les ressources nécessaires à l’activité même de la société. Il l’est l’un des premiers au Japon, au début des années 90, à communiquer à ces actionnaires dans un rapport annuel des chiffres sur la consommation de l’eau, de l’électricité, du papier et de l’essence. Il s’engage à réduire la consommation de toutes ces ressources de manière drastique (de 5 à 10% par an à périmètre constant) et y parvient chaque année – bien que cela soit de plus en plus difficile. « C’est le minimum que je puisse faire mais ce minimum, si tous les industriels s’y engageaient, solutionnerait déjà pas mal de nos problèmes actuels ».

Mais son ultime objectif est ailleurs : il souhaite modifier l’économie actuelle en une économie sans carbone. Il l’illustre en étant président de ZERI (Zéro Emission Research Initiative), un organisme créé il y a 10 ans par le bouillonnant Gunter Pauli*. Reconnu pour ses innovations et son influence grandissante dans de nombreuses industries, ce réseau a pour but de trouver une palette de solutions technologiques pour produire tout en émettant moins de gaz à effet de serre.

Par exemple, grâce à une technologie développée en collaboration avec ZERI, Yusuke a investi plus de 10 Millions d’Euros pour la construction d’un immense centre de traitement des déchets organiques. Celui-ci sera capable de traiter 150 tonnes de déchets par jour, provenant de restaurants et de supermarchés aux quatre coins du Japon, pour en faire des engrais biologiques. Non seulement, il souhaite, de manière ambitieuse (150 tonnes par jour est un volume très important dans le secteur), contribuer à solutionner le problème de l’accumulation des déchets, mais il le fait avec une méthode innovante (par carbonisation), permettant de fixer le carbone et ainsi lutter contre le réchauffement climatique.

Yusuke Saraya, infatigable entrepreneur et doux utopiste, nous aura une nouvelle fois prouvé qu’être un grand patron et un écologiste convaincu n’est pas forcément antinomique, et que parfois même, cela peut déboucher sur de nombreuses opportunités. Et lorsqu'on lui demande le fameux "Pourquoi ?", il conclue notre entrevue avec malice en répondant : "vous comprendrez sans doute quand vous aurez des enfants..."

* Gunter Pauli, « touche à tout génial » comme le qualifie Yusuke Saraya, est une des premières personnalités que nous avions identifié pour figurer parmi nos 80. Malheureusement, nous n’avons pu l’interviewer au Japon car il se déplace presqu’autant que nous. Nous le rencontrerons à notre retour en France.

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